La difficulté pour un groupe de rock, c’est durer, d’avoir une continuité, de faire plaisir aux fans d’hier tout en essayant d’en attraper d’autres. Il y a vingt ou trente ans, la question ne se posait pas. Aujourd’hui, un groupe peut d’un disque à l’autre basculer de la gloire au néant. Depeche Mode, comme son nom l’y prédisposait, a dû faire face à l’ironie des médias rock, qui n’ont jamais porté dans leurs coeurs les tourneurs de boutons.
Barrel Of A Gun est le premier single extrait du nouvel album, Ultra. Ainsi en cette année 1997, la techno emporte toutes les certitudes sur son chemin, les groupes de rock traditionnels, ont beaucoup de mal à rester les deux pieds sur terre. Là où U2, à grand renfort de communication, prétend faire un album moderne et futuriste, en s’alliant soit à Flood qui participa aux débuts de l’aventure Depeche Mode, soit à Howie B., sorte de Brian Eno du Casio Tone, Depeche Mode, tout en ne déclarant rien de particulier, sort un single cataloguant tous les dangers qui émergent à l’ère de l’Internet. Le tout avec une telle aisance que cela en est presque louche. Depeche Mode a vendu son âme, ou bien la façon dont il compose se prête sans problème particulier au temps, même si ce derniere passe vite.
Ce Barrel Of A Gun, dans sa version de base, est formidable, unde démonstration rigoureuse du chemin obligatoire qui rock et techno doivent negocier ensemble. La conjunction de l’écriture, du style Depeche Mode, et les talents de sorcier du son de Tim Simenon posent Barrel Of Gun comme l’impeccable single que Depeche Mode se devait de sortir.
Il eut été, avec le recul du jugement, impensable que Depeche Mode, qui a toujours joué avec des instruments non conventionnels, essaie de refaire le coup de Personal Jesus. Les trios déclinaisons qui suivent la version dite radio sont percutantes et auront toutes leurs fans. Quant à l’album Ultra, il se compose de onze chansons qui vont soulager les angoissés du devenir de Depeche Mode, et ennuyer ceux qui l’avaient enterré pour des motifs divers. Depeche Mode connaît trop la puissance de la recherché qu’autorise la technologie aujourd’hui, pour ne pas avour parallèlement à sa carrière, suivi le son du rock et celui que les gens réclament.
Ultra est un album à part entière, qui révèle une fois encore s’il est nécessaire, l’incorrigible côté romantique de Depeche Mode. Au fur et mesure que les chansons s’enchaînent et les titres défilent, on se demande si les members du groupe n’avaient pas déjà rêvé de cet album voici dix ans. On y retrouve intacte leur volonté de se battre, la montée en puissance d’une nouvelle idée de la pop. Eux qui ont toujours eu à se justifier de n’être qu’un groupe de play-back, doivent rigoler en voyant les gens se ruer aux raves ou acheter des albums de rock sans guitare.
Martin Gore, Andy Fletcher et Dave Gahan ont encore un toit solide, car la maison Depeche Mode est loin d’être hors garantie. Tant que leurs chansons seront composées à l’ancienne et déclinéesau future immediate, ils n’ont pas à craindre les méfaits du temps, qui ont usé pour toujours leurs camarades du depart, ceux qui comme eux avaient faix le choix visionnaire d’une musique dont le support ne serait plus la guitare et le Larsen. Il est certain que le groupe peut remercier le ciel d’avour été pressenti très tôt comme un espoir prometteur de la nouvelle scène anglaise de l’époque. Si Daniel Miller, le fondateur de Mute, n’avait pas fait prevue de curiosité, Depeche Mode n’aurait pas fait la carrière qu’on lui connaît aujourd’hui. Aussi étrange que cela paraisse, le monde du rock, par esprit et par principe rebelled à tout ordre ou orthodoxie, n’accepta jamais la remise en cause du rock par des adolescents mal dans leurs peaux, pas spécialement beaux et préférant se casser la tête à l’inventer une musique plutôt que de suivre les règles établies. Depeche Mode a la dure et involontaire responsabilité d’être le dernier rampart vivant du rock contre la banalité de la musique partout et tout le temps.
En conclusion: Ultra est l’album où un group, Depeche Mode, s’exprime, joue avec le feu, se remet en cause sur la moitié des titres, et pousse Depeche Mode, les individus et le groupe, dans une spirale ascensionelle. Ça y est! Ils prennent de la vitesse, conservent leur élan… Oui!!! Ils ont double tout le monde… Musique, maintenant!
Avec le recul, on a l’impression que Kraftwerk, qui trône dans chaque page imprimée en la matière, a été le point de depart de la technopop. Ce n’est pourtant pas ce groupe qui a popularise et engrangé les benefices de cette révolution dans le rock. Dans le chantier musical que fut l’Angleterre des années quatre-vingtes, Orchestral Manoeuvre in the Dark avait déjà fait un trou dans le mur du silence, avec un single considéré comme le second depart d’une pop électronique d’où sont absentes les guitares. Dans la foulée, Brian Eno a travaillé avec un groupe, John Fox, s’est consacré à la composition a partir de synthétiseurs. New Order, avec son célèbre maxi Blue Monday, a définitivement établi la junction entre techno-pop et club.
Le rock et pop étaient alors en train de connaître une mutation profonde. Le passé ne s’est plus jamais écouté de la meme manière. Pour les nouvelles generations d’adolescents, la musique a pu s’écrire au quotidian. Lorsque Depeche Mode s’est fendu de People Are People, le groupe a franchi son premier cap. Le succès de cette chanson était basée sur l’utilisation d’un sampler, une machine du diable, totalement révolutionnaire. L’introduction de People Are People a déclenché l’intérêt de milliers de musicians en herbe, pour qui la techno-pop n’existait pas. Depeche Mode a mis au point une formule qui est toujours valuable: synthétiseurs soutenus par des samplers, dans lesquels sont charges des sons de batteries, des choeurs ou de la guitare.